Allocution du 11 novembre 2023 de Jacques Myard, Membre honoraire du Parlement, Maire de Maisons-Laffitte et Membre du Conseil d’administration de Geopragma.

En août, le mois des moissons, dans la jeunesse du siècle, ils sont partis la fleur au fusil, certains de revenir pour noël.

La guerre est là, elle ne fut ni fraîche ni joyeuse, mais longue, terrible, meurtrière.

Elle faucha la jeunesse française, anglaise et allemande.

Elle bouleversera la carte politique du monde.

Elle fit périr les empires européens, la Russie des Romanov, l’Autriche Hongrie des Habsbourg, la Sublime-porte des Ottomans, le Reich du kaiser des Hohenzollern.

Les Nations d’Europe sont entrées en guerre presque avec volupté.

Les états-majors voulaient en finir, les tensions montaient inexorablement depuis des années les futurs belligérants semblaient se mesurer avant d’en découdre.

– 1904 1905 crise de Tanger née de la révolte franco-allemande pour le Maroc,

en 1906 la France obtient à Algésiras des droits particuliers au royaume chérifien,

– avril 1911 à la suite d’un coup d’Etat contre le sultan, l’Allemagne envoie à Agadir la canonnière Panther.

Caillaux, président du conseil négocie en secret avec les Allemands

– novembre 1911 la France cède une partie du territoire du Congo français et du Cameroun et obtient une entière liberté au Maroc,

– octobre 1912 première guerre balkanique contre les Ottomans,

– juin-juillet 1913 deuxième guerre balkanique contre les Ottomans,

– 28 juin 1914 Gavrilo Princip, nationaliste serbe, assassine le prince-héritier des Habsbourg l’archiduc François Ferdinand à Sarajevo.

Les vieilles Nations européennes courent à la guerre

L’engrenage implacable des alliances se met en branle

– la triple-alliance, l’Allemagne, l’Autriche Hongrie et en théorie l’Italie – Rome resta neutre à ce stade

– la triple entente, la France, l’Angleterre et la Russie,

ce jeu des alliances entraîne toute l’Europe et au-delà dans un cataclysme effroyable, 4 années, 3 mois et 14 jours de guerre,

La guerre fraîche et joyeuse d’où l’on devait revenir à noël faucha avec une folle ivresse la fleur de la jeunesse dans un brasier apocalyptique, de boue, d’obus et de chair.

Le mégaphone crie

« Allongez le tir

Allongez le tir, amour de vos batteries

Douille éclatante des obus de 75

Carillonnez pieusement »

Guillaume Apollinaire, Fusée

« L’obus tomba à peut-être à 100 m loin de nous, un petit éclat à peine gros comme un grain de maïs vint le frapper au front,

Le sang jaillit aussitôt,

 Il eut la force de me dire,

« Arrête-moi le sang et tu écriras à ma femme que je suis gravement blessé »

 Ce furent ses dernières paroles, son dernier soupir »

Joseph Gilles, le 26 mai 1916

 4 années de guerre,

 4 années de créativité mortifère au service des dieux destructeurs de l’univers œuvrant ensemble dans « un commun désastre »  Lucain, La Pharsale

– l’aviation fait des progrès fulgurants elle devient une arme de guerre avec des ingénieurs célèbres Marcel-Ferdinand Bloch ( Marcel Dassault), Henri Potez, Louis Coroller, Louis-Charles Breguet

Une arme de guerre servie par des pilotes intrépides Georges Guynemer, René Fonck, Charles Nungesser,

– James Mc Cudden de la Royal Air Force

Sans oublier du côté allemand

 – Manfred von Richthofen, le baron rouge, mort le 21 avril 1918 à Vaux-sur-Somme ; les alliés lui rendent les honneurs militaires.

Le général Estienne est le père du char Schneider réalisé au Creusot

Puis c’est le char léger Renault, le char FT 17,

C’est ce char qui, le 18 juillet 1918, engagé dans la contre-offensive alliée provoque la défaite du Reich de Guillaume II.

Le 22 avril 1915, lors d’une attaque, l’armée allemande utilise des gaz à Ypres en Belgique

« Le nuage s’avançait vers nous poussé par le vent. Presque aussitôt, nous avons été littéralement suffoqués » un soldat français

L’attaque d’Ypres a été supervisée par Fritz Haber, chimiste allemand. Comble de l’ironie, il reçut le prix Nobel de chimie en novembre 1919 (au titre du prix de 1918) pour ses travaux sur la synthèse de l’ammoniac ; après la guerre il dirige l’équipe qui mit au point le zyklon B …triste sire.

La 3e conférence de Genève en 1925 proscrit l’utilisation militaire de gaz asphyxiant ou toxique en vain. Le Japon utilise le gaz moutarde contre la Chine en 1941

Poilus ou officiers,

paysans ou ouvriers,

instituteurs ou écrivains,

prêtres ou libres penseurs,

catholiques ou juifs,

« Mon général,

 Je demande à passer dans l’infanterie pour des motifs d’ordre personnel

 Je suis d’une famille israélite naturalisée française

Mes aïeux en acceptant l’hospitalité de la France ont contracté une dette sévère j’ai un double devoir à accomplir

– celui de Français d’abord

– celui de nouveau Français ensuite

Ma place est là où les risques sont les plus nombreux »

Henri Lange ,

ils ont tout donné à la patrie en danger, leur jeunesse, leur enthousiasme,

ils ont tout donné jusqu’au sacrifice suprême,

– 1,4 million de soldats français sont tombés au champ d’honneur

– 900 jeunes français sont tués chaque jour

– 1,1 million sont blessés, invalides

– 300 000 gueules cassées en Europe dont 15 000 en France.

 Ils portent à jamais le visage de la guerre

« Ce sont les blessés de la trogne,

 du Val-de-grâce, joyeux fous.

 Riant de leur sort sans vergogne

 Ce sont les blessés de la trogne

 Revenant du monde où l’on cogne »

François Olier

En dépit de toutes ces souffrances, Guillaume Apollinaire chante son amour à Madeleine

 « Ô Madeleine,

 Je t’aime avec délice

 Si je songe à tes yeux, je songe aux sources fraîches

 Si je songe à tes seins le Paraclet descend

O double colombes de ta poitrine

Et vient délier ma langue de poète »

L’Amour plus fort que la mort,

15 juillet 1918, l’Allemagne lance une ultime offensive près de Reims. Ludendorff sait qu’il doit rapidement lancer son offensive qu’il dénomme « Friedensturm », la bataille pour la paix. Il attaque par surprise en Champagne sur la Marne.

Les Français, par un coup de main, ont connaissance de la date et de l’heure de l’offensive,

Le général Gouraud fait évacuer la première ligne française.

A 4h15 les Allemands se lancent à l’assaut mais épuisés ils sont arrêtés sur la 2e ligne française puissamment fortifiée, Ludendorff sait qu’il est tenu en échec et ne prendra pas Reims.

18 juillet les Français, avec la 10e armée de Mangin attaque à Villers-Cotterêts, pour la première fois, ils utilisent en masse les chars Renault FT 17 et 1500 avions.

Le 21 juillet Château-Thierry est libéré, la seconde bataille de la Marne s’achève.

Le 6 août Foch est aussitôt récompensé par le bâton de maréchal.

Le 8 août offensive franco-américaine vers Montdidier, nouveau revers pour les Allemands .

« Le 8 août est le jour de deuil de l’armée allemande » Ludendorff.

 Le 13 août il fait comprendre au gouvernement et à l’empereur Guillaume II qu’il faut demander l’armistice.

Le 9 novembre 1918 Guillaume II abdique.

Le 11 novembre 1918 à 5h20 du matin, Matthias Erzberger, un civil plénipotentiaire allemand, signe l’armistice.

Matthias Erzberger tenta pendant 3 heures de négocier des assouplissements aux conditions d’armistice,

Foch ne céda en rien aux demandes allemandes.

Les combats cessent à 11h00 sur tout le front.

Trompettes

Cessez- le-feu https://music.apple.com/fr/song/cessez-le-feu-clairon/291301064

La France est vainqueur.

« Trop de morts dorment sous la terre pour que j’ai le cœur d’un vainqueur »

 La France vainqueur retrouve les départements d’Alsace et de Lorraine.

 Les députés alsaciens et lorrains prennent leur place à la chambre aux premiers rangs de l’hémicycle où ils continuent de siéger aujourd’hui.

Leurs pères, députés protestataires en 1874, au Reichstag à Berlin, s’expriment en français pour dénoncer le diktat du traité de Francfort imposé par le Reich prussien de Bismarck.

 La France vainqueur, son territoire occupé par les Allemands est dévasté

Ses monuments pris systématiquement sous le feu de l’artillerie allemande,

la cathédrale de Reims dès 1914 est bombardée – elle reçut plus de 350 obus.

Lors de leur retraite sur la ligne Hindenburg les Allemands s’acharnent, ils détruisent

– le château de Concy, superbe édifice du 13e siècle avec son donjon de 65 mètres,

– les usines, 20 000 établissements industriels,

– 200 000 exploitations agricoles, 3 millions d’hectares.

Ces destructions massives justifient l’article 231 du traité de Versailles, partie VIII, intitulée « Réparation » dont les nazis se sont emparés pour en manipuler le sens. Sur les 132 milliards or prévus, l’Allemagne n’en paya que 20 milliards

Exsangue, défaite militairement, contrainte de demander l’armistice

Le haut commandement allemand affirme dans son communiqué du 11 novembre :

« Les soldats reviennent invaincus du champ de bataille »

En décembre 1918, le nouveau chancelier de la République de Weimar Friedrich Ebert, lors d’un défilé à Berlin d’une dizaine de divisions, souligne dans son discours l’invincibilité de l’Allemagne :

« Je vous salue soldat… aucun ennemi ne vous a vaincu »

Soldats allemands invaincus mais trahis par le fameux Dolstoss, la légende du coup de poignard dans le dos, portée par l’ennemi de l’intérieur, formidable manipulation dont les nazis vont se servir avec cynisme pour mettre à nouveau feu au monde,20 ans après !

Nous savons depuis les temps immémoriaux que l’histoire repasse les plats amers, ses vérités mensongères, manipulées.

Elle repasse d’autant mieux ses plats amers que trop d’âmes sensibles, faibles se laissent subjuguer par un pacifisme béat, illusoire !

Comment nos gouvernements ont-ils pu croire benoîtement aux dividendes de la paix, à la fin de l’histoire, au règne universel de la démocratie et désarmer la Nation ?

Les tragédies répétées d’aujourd’hui, guerres d’agression, guerres préventives, guerres par proxy, guerres asymétriques du terrorisme fanatique, enraciné dans les haines ancestrales en pleine renaissance au Proche-Orient, ces tragédies nous rappellent avec stupeur les temps de l’autre siècle où les Nations somnambules couraient vers l’apocalypse !

Sommes-nous revenus à ces temps d’inconscience collective ?

Allons-nous nous laisser gagner par l’inéluctabilité des guerres, solution ultime de tous les problèmes ?

Avons-nous perdu tout sens de nos responsabilités nationales ?

N’est-il pas temps de nous ressaisir, de retrouver raison ?

N’est-il pas temps de reprendre notre indépendance diplomatique ?

La France se doit de s’exprimer, sa voix singulière est attendue.

« la France n’est la France que lorsqu’elle entreprend une œuvre et qu’elle le fait pour le monde »

André Malraux, 1976

La France se doit de prendre des initiatives pour conjurer l’engrenage des conflits mortifères, pour ne pas succomber à des querelles qui ne sont pas les nôtres.

Veillons avec fermeté à maintenir l’unité nationale,

ne laissons pas les discordes, les haines étrangères poursuivre sur notre sol leurs conflits,

expulsons les éléments d’une 5e colonne qui se nourrissent de notre naïveté.

Il y va de la paix civile de la Nation.

Gardons-nous des illusions,

« Les Français nourrissent volontiers la conviction que des lois et ententes internationales parviennent à empêcher la guerre »

Charles de Gaulle

Notre indépendance, et notre défense, c’est la priorité incontournable de l’Etat pour assurer la sécurité de la Nation.

Voilà les ardentes obligations que nous devons à ceux de 14.

Vive les Nations d’Europe réconciliées

Vivent nos Alliés

Gloire à nos pères de 14

Vive la République

Vive la France !

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1 Comment

  1. Hugo - Reims

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    ßonjour – ßonne année, Merci de rappeler l’incroyable GACHIS de tant de jeunes Courages ! et plus généralement, la ƒuneste imposture de cette « Realpolitik » utilisée comme autreƒois « la gnôle » endormait les réticences de la troupe : Vous parlez des « VOLUPTÉS » de la marche à l’abîme… Gott mit uns, tout ennemi est inƒâme et « mérite » un éternel châtiment – ment – ment – ment – mensonges conƒortables……………

    Vous ƒaites bien de rappeler que ce conƒlit-là n’est PAS archaïque, ante-diluvien, même si le suivant noya dans l’horreur inƒernal de la désolation tout ce qui avait survécu : J’ai été estomaqué par la détresse en voyant, pour le Centenaire de la Bataille de Verdun, des nuées de jeunes écervelés, amenés là pour une ƒête sans vergogne entre les tombes, au nom de la Joie Universelle retrouvée.

    « £’homme naît bon, la-société le déprave », c’est bien connu depuis J-J. R. En tous cas, la guerre le rend ƒou : £e ƒilm de Christian Carion « Joyeux Noël » montre, hélas ! comment les aumôniers DES DEUX BORDS ((et leurs hiérarchies)) ont osé condamner la Trêve de Noël des inƒortunés soldats en Première ligne, découvrant soudain qu’ils ne se détestaient point ! ! !

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