Veille effectuée par Marc Adan Ourradour*
Les évènements de la semaine :
24/04
- Le GUN annonce avoir mené des frappes aériennes autour de la base aérienne d’Al Watiya.
- Combats au sud de Tripoli (Ain Zara).
25/04
- L’Union Européenne ainsi la France, l’Allemagne et l’Italie appellent à un cessez-le-feu.
26/04
- Les forces du GUN mènent des frappes aériennes sur Tarhounah.
27/04
- Le maréchal Haftar déclare prendre le pouvoir et qu’il disposerait d’un mandat du peuple.
- Les forces du GUN tirent des roquettes sur Tarhounah.
28/04
- Combats et bombardements à Tripoli.
- Les forces du GUN ont repoussé une offensive au Sud d’Abu Grein.
- Deux drones du GUN bombardent un convoi au Sud de Bani Walid.
29/04
- Le ministre des affaires étrangères du GUN dénonce une violation de l’espace aérien libyen par la France.
- Le porte-parole de l’ANL annonce un arrêt des combats pour le Ramadan.
- Le porte-parole du GUN menace de détruire tout convoi qui se dirigerait sans autorisation vers la base d’Al-Watiya.
- Bombardement et offensive mené par le GUN dans plusieurs localités au nord de Tarhounah.
- Poursuite des combats au sud de Tripoli.
30/04
- Le GUN refuse la trêve proposée par le maréchal Haftar.
- Une réunion sur le dossier libyen s’est tenue autour du président tunisien.
- Le GUN bombarde la base aérienne d’Al-Watiya.
- Les Emirats Arabes Unis dénoncent les actions de la Turquie en Libye qu’ils considèrent comme un obstacle pour l’application d’un cessez-le-feu et la résolution du conflit.
- La Turquie répond en dénonçant l’action des EAU en Libye, en Syrie, au Yémen et dans la Corne de l’Afrique.
Analyse :
Nous observons cette semaine que ce sont les forces du Gouvernement d’Union Nationale (GUN) qui ont l’initiative. Elles continuent leurs offensives au sud de Tripoli et au nord de Tarhounah. L’intensification de l’intervention turque (janvier 2020) a changé le rapport de force et l’Armée Nationale Libyenne (ANL) du Maréchal Haftar recule. Les forces du GUN ont repoussé une offensive à Abu Grein et bombardé la base d’Al-Watiya (une des principales bases de l’ANL à l’ouest du pays). Face à l’intensification des combats et à la menace du COVID-19 qui pèse sur le pays, la communauté internationale a multiplié les demandes de cessez-le-feu. Mercredi, un porte-parole de l’ANL s’est joint à ces demandes et a annoncé une trêve, qui dès le lendemain, a été rejetée par le GUN. Nous pouvons y voir un signe de fébrilité de l’ANL qui a sans doute besoin de temps pour se réorganiser et acheminer des renforts sur les différents fronts. Plus que jamais, le Maréchal Haftar a besoin de ses alliés pour reprendre la main.
En début de semaine, le Maréchal Haftar a annoncé à la télévision qu’il avait reçu un mandat du peuple pour gouverner la Libye. Ainsi il tente de faire oublier ses récents revers et montre qu’il reste un acteur incontournable. Pourtant cette annonce n’est-elle pas maladroite dans le sens où elle ne ferait que l’isoler encore plus ? Alors que le GUN est reconnu par les Nations Unies, comment des pays tel que la France ou la Russie, pourraient-ils soutenir publiquement un homme qui annonce l’instauration d’un régime autocratique ? Le Maréchal Haftar ne peut être que désavoué. Dans un point presse, le Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères a déclaré : « La solution au conflit libyen ne peut passer que par le dialogue entre les parties sous l’égide des Nations unies, non par des décisions unilatérales. » Les réactions des autres pays vont dans le même sens. De plus, le Maréchal Haftar annonce la fin des Accords de Skhirat signés en 2015 sous l’égide des Nations unies qui ont permis la formation du GUN. La Turquie en profite et demande aux grandes puissances de se positionner. La France a en partie justifié son intervention par la protection des populations civiles face à la dictature de Mouammar Kadhafi. Elle ne peut soutenir publiquement qu’une solution démocratique dans le cadre des Nations unies. En parlant des Accords de Skhirat, indirectement et involontairement, le Maréchal Haftar rappelle à tout le monde que ce n’est pas lui qui possède la légitimité internationale. Tout cela nous renvoie à des questions plus profondes sur les régimes politiques. La démocratie libérale est-elle adaptée à tous les peuples ? Est-ce une finalité ou un outil dont se servent certaines puissances pour justifier leurs actions ? Toutes ces questions ne sont pas nouvelles. Dans l’Antiquité dejà, les Grecs demandaient au sage Solon « quelle est la meilleure constitution ? » et il répondait : « Dites-moi, d’abord, pour quel peuple et à quelle époque ?»
*Marc Adan Ourradour, stagiaire chez Geopragma