[Как атомные подлодки Австралии поставят Китай на колени]

(site de « Взгляд » : https://vz.ru/world/2021/9/21/1119944.html )

Un regard russe sur les dynamiques militaires en Indo-pacifique suite à l’officialicialisation de l’alliance Aukus dirigée contre la Chine. Article rédigé par le journaliste Alexander Timokhin, et traduit du russe par Olivier Broun, adhérent de Geopragma.

 

      Dans quelques années, le monde comptera un autre pays doté d’une flotte de sous-marins nucléaires : l’Australie. Quel type de sous-marins ce pays recevra-t-il de ses alliés, quel type de capacités de combat offriront-ils et quel scénario pourront être utilisés pour dissuader la puissance militaire de la Chine ?

      Tout doit être étudié par comparaison. Quels sont les huit sous-marins nucléaires polyvalents (à ne pas confondre avec les sous-marins armés de missiles balistiques) que l’Australie recevra ? Comparons avec d’autres flottes.

      D’abord prenons l’exemple de la Chine, contre laquelle (du moins à ce qu’on dit) tout se trame. La Chine ne dispose plus que de neuf sous-marins nucléaires polyvalents et peu furtifs. Trois d’entre eux sont du type 091, des navires vieux et bruyants avec peu ou pas de valeur de combat. Les six autres sont des 093, des bateaux plus modernes, bien qu’inférieurs aux modèles les plus récents américains et britanniques. En fait, ces six sont les seuls à avoir une réelle valeur de combat, et c’est ce nombre qu’il faut prendre en compte.

      Il faut dire que les Chinois ont fait d’énormes progrès par rapport à leur niveau initial. Leurs sous-marins sont déjà armés de bonnes torpilles et de moyens pour contrer les torpilles ennemies. Mais ils ont encore un long chemin à parcourir avant de rejoindre le niveau des Astute britanniques ou des Virginia américains. En théorie, la dernière modification du Virginia (un Bloc, comme disent les Américains) pourrait être utilisée pour une frappe massive non nucléaire de haute précision sur le territoire chinois. Dans ce cas, les Australiens seraient en mesure d’intensifier la salve américaine. À l’avenir, lorsque les Américains auront achevé leur programme de missiles hypersoniques pour la marine, cette frappe pourrait également être très rapide.

      Ce serait une toute autre histoire si les Américains piétinaient à nouveau les normes internationales et déployaient des armes nucléaires sur les sous-marins australiens avant la guerre. L’Australie pourrait causer des dommages considérables à la Chine (et pas seulement à la Chine) en utilisant des missiles de croisière ou hypersoniques. Et même de simples Tomahawks, s’ils étaient utilisés sans préavis, pourraient causer des dommages importants à la partie attaquée – tandis que les caractéristiques de performance du Virginia lui permettraient de s’approcher secrètement d’une côte bien gardée pour porter un coup soudain et inattendu.

      Bien entendu, cela est ne sera possible que si l’Australie construit les Virginia avec des lance-missiles verticaux plutôt que l’Astute, qui ne peut utiliser les Tomahawks qu’à travers les tubes lance-torpilles. La réponse à cette question n’est pas encore disponible.

      Dans l’éventualité d’une guerre de type guerre navale classique, ces sous-marins constitueraient une menace supplémentaire pour la Chine, et celle-ci serait tenue de consacrer des forces supplémentaires à cette menace, ce dont elle aurait grandement besoin dans une guerre avec les États-Unis et la Grande-Bretagne, même sans l’Australie.

      Les Chinois prennent soin de leur marine et la développent. Ils disposent de forces anti-sous-marines de surface et d’une aviation anti-sous-marine, mais avec des missions de combat en dehors du rayon de combat de leur aviation de base (côtière en langage « familier »), le problème du traitement des forces sous-marines ennemies deviendra très aigu pour la Chine. Les navires de surface chinois seront bombardés depuis les airs par les bases aériennes australiennes et américaines, les avions de lutte anti-sous-marine ne pourront pas opérer sans couverture et, de fait, toutes les tâches devront être effectuées par des sous-marins chinois à propulsion nucléaire. Les sous-marins à propulsion nucléaire de la Chine ne peuvent pas encore atteindre les normes occidentales (et les futures normes australiennes) ; ils devront opérer sans soutien contre des forces ennemies hétérogènes (sous-marins, avions de lutte anti-sous-marine et navires de surface).

Comment la Chine va-t-elle réagir?

      Le meilleur espoir de la Chine réside dans les nouveaux sous-marins à propulsion nucléaire polyvalents en cours de construction, appelés dans la presse étrangère « Type 095″ et en Chine même  » 09-V ». Une analyse visuelle des images du navire montre clairement que la Chine tente de mettre en œuvre de nombreuses solutions techniques pour accroître la furtivité du sous-marin et sa capacité à détecter des cibles immergées. Il est évident que c’est un sous-marin qui est construit pour le combat.

      Quelles options pour les chinois ? La question est ouverte. Le plus important est qu’ils ne peuvent pas s’attendre à une supériorité qualitative, au mieux à un niveau égal. Mais surtout, si la Chine maintient le rythme actuel de modernisation de sa force sous-marine, elle sera quantitativement inférieure é celle des Américains et des Britanniques, même sans l’Australie, et de loin. Ses nouveaux navires sont toujours en projet, et la Chine n’en a encore construit aucun. Et une autre flotte de sous-marins nucléaires hostiles obligerait certainement les Chinois à investir très rapidement et très sérieusement dans le développement de leur production, ce qui nécessite à la fois du temps, de l’argent et des ressources.

      La Chine peut-elle ignorer cette menace ? Non.

      Un exemple parmi tant d’autres. L’Australie pourrait géographiquement couper complètement le passage entre la Chine et l’océan Indien : elle dispose d’un accès direct et non contrôlable par les chinois à l’océan Indien, tandis que la Chine n’a que le détroit de Malacca, que l’Australie, avec ses nouveaux sous-marins, serait en mesure de couper de l’océan Indien. Resterait à passer au large de l’Australie elle-même, avec ces mêmes sous-marins et ses avions. Il n’existe pas d’autre « route » permettant de livrer de grandes quantités de pétrole à la Chine.

      L’Australie n’aurait jamais eu ces possibilités sous cette forme si elle avait maintenu ses commandes de sous-marins non-nucléaires à la France. Un sous-marin non-nucléaire (et en particulier le dieselélectrique) n’est pas capable, par exemple, d’aller sous l’eau à grande vitesse, alors que les Virginia et les Astute le peuvent, et de manière furtive, sans augmentation critique du bruit. Tandis qu’un sous-marin non-nucléaire doit livrer du carburant à la zone de combat, un sous-marin nucléaire n’en a pas besoin – un sous-marin nucléaire n’est lié ni aux bases proches ni au carburant et peut opérer de manière incommensurablement plus libre qu’un sous-marin diesel-électrique, y compris même avec une centrale de production d’air.

      Au combat, un sous-marin à propulsion nucléaire présente également de nombreux avantages, notamment la capacité d’échapper parfois aux torpilles ennemies. Pour un hypothétique sous-marin australo-français non-nucléaire, ce serait impossible. Il est difficile de comparer le système de sonar des Virginia avec quoi que ce soit d’autre, et cela concerne la portée de détection des cibles et la portée de tir.

      Désormais, la Chine, outre les mesures visant à contrer les flottes de sous-marins américaines et britanniques, devra également tenir compte de l’Australie, qui s’apprête à disposer d’un sous-marin nucléaire plus puissant que tout ce que la Chine possède actuellement.

      Comment cela se traduit-il en chiffres ? En se basant sur le nombre de Virginia déjà construits et en cours de construction qui seront en service d’ici 2036, date à laquelle les Australiens comptent sur leurs huit sous-marins, on peut supposer qu’il y en aura une vingtaine. Ils ne peuvent pas tous être lancés contre la Chine, certains des sous-marins seront nécessaires en cas d’action d’urgence contre la Russie. Ainsi, huit sous-marins australiens supplémentaires augmenteraient d’au moins un tiers le nombre d’unités faisant face à la Chine, par rapport aux seuls sous-marins américains. C’est même plus que ce que les Britanniques pourront donner pour une guerre avec la Chine. Et la Chine devra renforcer sa flotte de sous-marins et ses autres forces navales dans des proportions comparables.

      Tout compte fait, pour la Chine, ces huit sous-marins ennemis supplémentaires sont un os dans la gorge. Voilà ce que s’apprêtent à faire les Américains et les Britanniques. C’est la raison d’être des huit sous-marins à propulsion nucléaire.

      C’est ce qui a suscité la réaction de la Chine à la nouvelle. Le ministère chinois des affaires étrangères a déclaré que le transfert de technologie de construction de sous-marins nucléaires à l’Australie est préjudiciable au régime de non-prolifération nucléaire et « exacerbe la course aux armements », et que les États-Unis et la Grande Bretagne sont « extrêmement irresponsables » en appliquant deux poids, deux mesures. Bien entendu, ces exhortations ne mèneront à rien.

      Et qu’est-ce que cela signifie pour la Russie ? Dans le même temps où l’Australie veut disposer de huit sous-marins polyvalents d’ici 2036, nous aurons dans l’idéal quatre sous-marins de type Iassen dans le Pacifique cette année-là – Novosibirsk, Krasnoyarsk, Vladivostok et, vraisemblablement, Perm. Quant au futur navire du projet 545 portant le nom de code de conception Laika, la façon dont Laika a été présenté au président en décembre 2019 donne une idée de l’obsolescence évidente du projet. Plus important encore, il est très peu probable que tous ces navires soient en service au milieu des années 30. Ceci donne une autre illustration de ce que représente ce projet après tout, – huit sous-marins à propulsion nucléaire sur un seul théâtre de guerre.

      Cependant, les « partenaires » peuvent rencontrer des difficultés à réaliser ces merveilleux projets.

Est-ce vraiment si simple?

      Il y a un aspect qui pourrait compliquer les choses. Produire huit sous-marins à propulsion nucléaire, dotés de systèmes de haute technologie, n’est pas chose aisée. S’ils construisent un projet préfabriqué, comme le Virginia, ils n’auront pas plus de 14 ans, à partir de l’année prochaine, pour construire huit sous-marins nucléaires. C’est un rythme extrêmement rapide pour huit unités ; il faut cinq ans aux Américains pour construire un Virginia, de la pose à la livraison à la marine.

      Est-il possible pour les Australiens de respecter le délai ? Oui, mais seulement à condition de développer une méthode « extensive » – développer plus de sous-marins par an que les Américains. Cela nécessiterait, premièrement, un nombre suffisant de chantiers navals pour construire des sous-marins, deuxièmement, des travailleurs et des ingénieurs, et troisièmement, la fourniture de composants en provenance des États-Unis, ce qui pourrait devenir le goulot d’étranglement du projet, étant donné la crise de la construction navale américaine. L’Australie dispose-t-elle de tous ces éléments en quantité suffisante ? Les alliés ne peuvent pas aider ici, ils en manquent eux-mêmes.

      Mais si les Australiens devaient construire un projet britannique, que ce soit l’Astute ou, comme on le dit actuellement en Grande-Bretagne, un futur projet de sous-marin britannique polyvalent destiné à remplacer l’Astute, cela ne fonctionnerait pas. La Grande-Bretagne parvient à peine à construire elle-même ses propres sous-marins, y compris en termes de sous-traitance. Et en plus, dans le cas des Astute, les sous-traitants viennent aussi en partie de France, laquelle a été « abandonnée » par les

      Anglo-Saxons. Le Royaume-Uni pourrait certes compenser de cette manière la France de la perte du contrat australien pour les sous-marins non-nucléaires, mais le problème du calendrier se poserait également.

      Les Australiens semblent s’en rendre compte. Dimanche 19 septembre, le ministre australien de la Défense, Peter Dutton, a annoncé que l’Australie n’attendrait pas la construction de ses sous-marins nucléaires, mais achèterait ou louerait des sous-marins britanniques ou américains.

      C’est en effet possible. Certes pas avec des sous-marins britanniques, mais très probablement avec des sous-marins américains, bien qu’un tel schéma n’entraînerait pas l’augmentation souhaitée des forces antichinoises – les sous-marins contre la Chine resteraient les mêmes, seuls certains auraient changé de pavillon. Premièrement, les Australiens auront alors une expérience des sous-marins nucléaires lorsqu’ils auront terminé la construction de leur ligne (même s’ils ne les ont pas tous et avec un certain retard), et deuxièmement, les États-Unis ont des problèmes avec les réparations de sous-marins (ils ne peuvent pas suivre), donc laisser certains de leurs navires de guerre à l’Australie signifierait en fait les sauver comme véhicules de combat, même s’ils battent un autre pavillon.

      En somme, faire de l’Australie un pays doté d’une flotte de sous-marins nucléaires peut se faire rapidement. D’autant plus que les auteurs de cette entreprise ont une très bonne raison de le faire.

Des constatations sombres pour l’avenir

      Des investissements aussi gigantesques et des revirements politiques aussi spectaculaires ne sont pas le fruit du hasard. L’hégémonie des Anglo-Saxons dans le monde est sérieusement ébranlée, à la fois en raison de leur propre faiblesse interne, de la montée de la Chine et du sabotage de leur système de pouvoir par la Russie. Il est bien évident qu’ils ne renonceront pas définitivement à leur pouvoir sur l’humanité et aux avantages qui en découlent.

      Il faut l’admettre : le monde est au bord de la guerre. L’accord de l’Australie avec les États-Unis et la Grande-Bretagne dit exactement cela. Une guerre mondiale ordinaire avec des dizaines de millions de morts, ou, alternativement, avec des centaines de millions, parce que les armes nucléaires n’ont pas été abandonnées. Une telle guerre est presque inévitable.

      De plus, en connaissant les délais que les « partenaires » se fixent, on peut comprendre approximativement le temps pour lequel ils préparent une « phase chaude ». Si l’on observe comment les autres pays se préparent à la prochaine guerre mondiale, il est temps pour nous d’examiner d’un œil critique, honnête et sans préjugés la manière dont nous nous y préparons.  

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1 Comment

  1. Emmanuel Huyghues Despointes

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    J’approuve le contenu de cet article, notamment sur le fait que les sous-marins diesel-électriques sont un système d’armes obsolète, sauf la conclusion : le monde est dangereux, certes, mais pas au bord de la guerre mondiale

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