Par Patricia Lalonde, vice-président de Geopragma

La guerre au Yémen restera dans l’histoire de ce siècle comme l’une des plus grosses crises humanitaires. Ces derniers mois, 85 000 enfants de moins de 5 ans seraient morts de faim.

L’éclosion d’épidémies, le retour d’une maladie pratiquement disparue, le choléra meurtrissent massivement ce peuple martyr. Tout le monde a en tête la photo de cette petite fille yéménite à la Une du New York Times…

Sans les révélations sur l’odieux meurtre de Jamal Khashoggi, cette guerre aurait continué « business as usual » dans un silence assourdissant des media, guerre par proxies entre l’Arabie Saoudite et l’Iran. Depuis 2 ans, toutes les tentatives de paix ont échoué.
Celle de Genève en Septembre a été un échec, l’un de ses principaux protagonistes, le gouvernement de facto de Sanaa représenté par les Houthis, ayant décliné l’invitation.
Pourtant, jusqu’au dernier moment, Martin Griffith, l’envoyé spécial des Nations Unies n’a pas ménagé sa peine pour obtenir les garanties demandées par les Houthis à savoir l’assurance d’être sûrs de pouvoir retourner au Yémen… Ce qu’ils n’ont pas obtenu. Pire encore, la responsabilité de l’échec des pourparlers leurs a été attribuée… La réalité est que la Coalition, menée par l’Arabie Saoudite n’avait aucunement l’intention de négocier avec le gouvernement de Salut National au pouvoir à Sanaa.


Le but principal de cette guerre pour la Coalition est la reprise du port d’Hodeïda des mains des « rebelles »… Déjà en Juillet dernier, la Coalition avait repris ses bombardements sur ce port, pensant faire céder les Houthis avant les négociations prévues en Septembre. L’été a été sanglant, 40 enfants d’un bus sont morts sous les bombes américaines lancées par les avions saoudiens. Cependant les Houthis ont résisté, infligeant des pertes importantes aux mercenaires de la Coalition venus du Soudan, d’Erythrée, du Pakistan, de Somalie et même d’Australie… La guerre ayant repris de plus belle, les échecs de la Coalition se répétant, Martin Griffith a repris son bâton de pèlerin pour repartir à Sanaa, pour aller sur le terrain à Hodeïda constater les dégâts et évaluer le véritable rapport de forces.

Les Houthis proposent de laisser la gestion du port d’Hodeïda aux Nations Unies, voire même à un Etat membre de l’Union Européenne, et d’en partager les revenus avec un futur gouvernement d’Union nationale… « Le gouvernement légitime » réfugié à Ryad a refusé ces conditions qui semblaient pourtant acceptables, la Coalition prétextant que le détroit de Bab el Mandeb tomberait aux mains des Iraniens ! Martin Griffith est revenu à la charge, et a réuni les conditions nécessaires à la venue des Houthis aux négociations en Suède, allant même jusqu’à accepter de partir dans l’avion des Nations Unies avec l’équipe de négociateurs.

Il a également obtenu qu’une cinquantaine de blessés soit transférés à Oman pour être soignés.

Ces négociations en Suède sont une véritable lueur d’espoir…

Une trêve a été décidée à Hodeïda. Les Nations Unies assureront la surveillance du port.

Mais rien n’est encore joué… Les combats peuvent reprendre à tout moment et faire capoter les accords de Stockholm. Martin Griffith sait qu’il est la dernière chance pour sauver un accord de paix, et que la crédibilité des Nations Unies y est en jeu. L’Europe doit l’aider dans cette mission.

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