Billet du lundi 27 janvier 2025 rédigé par Emmanuel Goût, membre du Conseil d’administration de Geopragma.

Un Etat palestinien est-il encore possible, à supposer que son existence n’ait jamais été prise en compte sérieusement par l’Etat hébreu. Ce serait surement insulter la mémoire de son premier ministre Yitzhak Rabin, assassiné par un extrémiste israélien le 4 novembre 1995, que de penser que la constitution d’un Etat palestinien respectueux de la sécurité d’Israël (la réciprocité relève bien entendu de bon sens) n’ait jamais été sérieusement considérée possible. Mais la géographie d’alors était bien différente.

Il suffisait de traverser la Cisjordanie dans les années 90 pour s’en rendre compte : quelques îlots de colons israéliens au milieu d’un territoire peuplés de paysans palestiniens, de bédouins et des villes bouillonnantes – en particulier Hébron -. Une “décolonisation” eut été alors facilement envisageable mais la situation est désormais de fait inversée. 

La Cisjordanie ressemble plus à un territoire aux mains des colons, à l’exception de Ramallah, avec des îlots palestiniens pour ne pas dire, en ce qui concerne les villes, des ghettos palestiniens aux économies suffoquées puisqu’une ville comme Hébron est totalement encerclée de postes de contrôle.

Comment ne pas par conséquent dénoncer l’hypocrisie de toute évocation du principe de deux Etats, tant une évacuation de la Cisjordanie est devenue totalement impossible à la suite de la politique de colonisation des trente dernières années.

Ladite “Autorité Palestinienne” est une autorité plus que jamais fantoche quand elle n’est pas corrompue, en témoigne son impuissance totale à éviter la colonisation ou, encore ces jours-ci, à éviter que la guerre ne se déplace de Gaza à Jenin. Elle est aussi la principale conséquence du cynisme de Netanyahu, qualifié de “criminel de guerre” par Jacques Attali (L’Invité TV5), qui, comme le décrit fort bien Charles Enderlin dans son dernier livre “le grand aveuglement”, favorisa les financements au Hamas pour affaiblir ladite Autorité et conduira indirectement à la tragédie du 7 octobre 2023.

La lecture des cartes demeure le meilleur outil au service des diplomaties. Paradoxalement, celle-ci pourrait nous conduire à retourner notre regard vers Gaza détruite aux trois quarts dans l’indifférence honteuse de l’Occident en proie au deux poids trois mesures. Une nouvelle perspective pourrait s’offrir à nous, une perspective géo-compatible.

Gaza, six fois la superficie de la République de San Marin, surpeuplée, face Méditerranée, une frontière avec l’Egypte et bien évidemment Israël, pourrait se reconstruire sous la forme d’un “micro Etat”, comme d’autres : le Vatican, Monaco, Andorre, le Liechtenstein…

Dans le cadre d’un plan de Paix et de reconstruction, le soutien financier viendrait d’un nombre de pays arabes et de la communauté internationale, transformant ce rectangle de terre en un nouvel Hub face Méditerranée.

Question légitime : mais que deviendraient les territoires palestiniens en Cisjordanie ? difficile à dire car la seule survie possible serait celle de “zones détachées” du nouvel Etat palestinien de Gaza, ce qui permettrait d’éviter l’annexion totale par Israël, ce qui cependant me semble la solution la plus probable dans le contexte actuel. Une solution qui ne devrait nullement satisfaire l’Autorité palestinienne dont les intérêts de toute nature sont bien ancrés dans le peu de territoires qu’ils ont réussi à préserver. Une solution dont il faudrait probablement éviter que le Hamas – responsable des massacres du 7 octobre 2023 mais aussi du conditionnement de la population même de la bande de Gaza, ne transforme en victoire mais pour cela celui qui a la main sur le portefeuille devra se faire garant d’une institution politique palestinienne en mesure de répondre aux exigences intérieures et des voisins du nouvel Etat.

Dans un monde qui a décidé de faire bouger les frontières, tout peut et doit être envisagé quand ces bouleversements servent la Paix.

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5 comments

  1. Emmanuel Huyghues Despointes

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    Je souscris entièrement à l’analyse du général Pinatel et, pour répondre à M. Bernard Cornut qui voit le problème uniquement en Droit International, je ne peux que lui citer un interview d’Élie Barnavi, ancien ambassadeur d’Israël en France, qui milite pour une solution à 2 états, que cette solution génèrera une OAS israélienne virulente. Cette réalité représente un paramètre qui rend très difficile une solution politique.

  2. Répondre

    Partant du principe était un état palestinien dirigé par le Hamas (mouvement terroriste soutenu par le Quatar et l’Iran avec le Hezbollah ).
    L’autorité palestinienne représenté par Abou Mazen.
    Le Hamas élu sans une durée de mandat définie !
    Quel est le dénominateur commun est : quels responsables de ces trois mouvements ?
    La réponse est la haine des juifs car aucun de ces responsables accepteraient la présence d’un seul Juif sur ce nouvel etat ! Ils l’ont dit eux-mêmes !
    Si vous prenez Gaza comme terrain d’essai, le moins que l’ont puisse dire c’est qu’il n’est pas concluant ! Les marionnettistes seront de toutes les façons en actions !!
    Pour mémoire à la création d’Israel deux états furent proposé et finalement refusé par le arabes !
    Les autres ont pris la nationalité Israélienne .
    Le veux deux états furent deux états passe par la reconnaissance de l’un envers l’autre ! Si non c’est réduire l’espace de sécurité à l’encontre d’Israel !!

    • Chico

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      C’est clair pour vous . Tout ce qui se passe en Palestine avec la colonisation, les vols, expulsions, génocide, c’est la faute des palestiniens . Faut bien construire l’histoire de gagnants et les laver de leur crimes . L’Allemagne nazie, Dieu merci, avait perdu la guerre . Mais pas de chance pour les palestiniens . Réponse à la hauteur .

  3. Bernard CORNUT X, expert M-Orient

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    Je lis une fois de plus « une évacuation de la Cisjordanie est devenue totalement impossible » NON, il suffit qu’en préciser les modalités lors d’une période de transition (sécurité, désarmement de tous les civils, contrôle des frontières) sous le contrôle ferme d’une force de l’ONU avant la pleine souveraineté de l’Etat de Palestine continu et viable (Cisjordanie J. Est, Gaza et un couloir négocié comme le demande l’UE depuis plus de 20 ans). Evidemment les colons violents partiront sans attendre les lois de Palestine pour ses résidents étrangers; d’autres resteront en confiance réaliste. Le Chapitre VII de la Charte permet cela. « Le Conseil a à tout moment le pouvoir et le devoir de rétablir la paix ». L’essentiel est de rédiger les termes adéquats d’une Résolution juste, réaliste pratique, acceptable par les majorités, y compris aux USA. Ne pas se laisser submerger par les extrémistes. Je précise que je connais très bien le terrain depuis plus de 30 ans…. Et qu’une telle Résolution sera énoncée au final de mon film « Chapitre VII. La Palestine à côté, demain », déjà tourné, en cours de montage, qui sortira avant avril, mois de présidence française au Conseil de Sécurité.

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