Article de Renaud Girard* publié dans le Figaro le 16/03/2020

Géopolitiquement, la pandémie de maladie à coronavirus, née en Chine en 2019 (Covid-19), a mis en lumière la faillite de trois idéologies : le communisme, l’européisme, le mondialisme.

Le parti communiste chinois (PCC) porte une très lourde responsabilité dans la naissance et la dissémination initiale de cette maladie très contagieuse. D’origine animale, le virus a été transmis à l’homme à Wuhan, grande ville du centre de la Chine. Cette transmission s’est faite sur le marché de Huanan, à la fin du mois de novembre 2019. C’était un marché où l’on vendait des animaux sauvages et domestiques vivants, dont les cages étaient entassées, dans des conditions d’insalubrité répugnantes. Le virus a été au départ transmis par une chauve-souris, qui l’a passé à un pangolin. Les riches Chinois sont friands d’animaux sauvages, consommation à laquelle ils prêtent quantité de qualités imaginaires (augmentation de la force physique, de la puissance sexuelle, etc.). Le virus Ebola provenait lui aussi d’une chauve-souris. Le virus du sida a été transmis à l’homme par un chimpanzé.

Le problème est que les autorités chinoises n’ont tenu aucun compte d’une précédente alerte. En novembre 2002, une épidémie de SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère, dû à un coronavirus) était née dans la province du Guangdong (sud-est de la Chine), sur un marché vendant lui aussi des animaux sauvages et domestiques vivants. Tous les scientifiques connaissent le danger des zoonoses (maladies infectieuses des animaux vertébrés transmissibles à l’homme).

Plus grave encore que cette imprudence, la deuxième faillite du PCC est venue de son addiction au mensonge d’Etat et à la dissimulation. Obsédé par son impératif de garantir à tout prix la « stabilité sociale », le PCC de la région de Hubei a préféré au départ fermer les yeux. Il a même sanctionné des médecins de l’hôpital central de Wuhan pour avoir sonné l’alerte. Le PCC n’a toujours pas expliqué au monde pourquoi il avait abruptement ordonné la fermeture du laboratoire de santé publique de l’Université Fudan (Shangaï) le 12 janvier 2020. La veille, ce laboratoire de pointe avait publié le séquençage du virus Covid-19 sur virological.org, un forum scientifique de discussion sur les virus, en libre accès. C’est la publication de ces données sur le génome qui a permis la mise au point d’un nouveau kit de test pour diagnostiquer le virus.

Les cadres du PCC ont fait, pendant trois semaines, passer la logique d’un pouvoir prétendument infaillible avant la vérité médicale. Ces trois semaines perdues dans le combat initial contre le virus pèsent aujourd’hui très lourd. Si la maladie avait été traitée dès qu’elle a surgi, il n’y aurait pas aujourd’hui de pandémie.

Comme si ce n’était pas suffisant, le PCC a ajouté le « fake news » au mensonge et à la dissimulation. Le 13 mars 2020, Zhao Lijian, le nouveau porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères a osé tweeter que « l’armée américaine pourrait avoir apporté l’épidémie à Wuhan ». En octobre 2019, des soldats américains avaient participé aux jeux militaires mondiaux, qui s’étaient déroulés à Wuhan. Les autorités communistes chinoises sont aujourd’hui très nerveuses car elles saisissent que leur peuple sait parfaitement qu’elles lui ont, au départ, menti, et qu’elles n’ont lancé que tardivement leur implacable – et apparemment réussie – offensive contre le virus.

La deuxième faillite est celle de l’idéologie européiste, qui considère la construction européenne (et sa religion d’ouverture des frontières) comme un idéal en soi, au lieu de n’en faire qu’un usage pragmatique, dans l’intérêt concret des différentes nations de l’UE. Le 13 mars 2020, la présidente de la Commission européenne a critiqué la fermeture des frontières décidées par certains pays de l’UE pour lutter contre la pandémie. Le lendemain, le pays natal d’Ursula von der Leyen adoptait une telle mesure de bon sens… Les Chinois ont bien « fermé » les frontières du Hubei, province cinq fois plus étendue que la Hollande ! La décision de Trump de fermer dès la fin janvier ses frontières aux voyageurs en provenance de Chine, explique le retard de la maladie en Amérique par rapport à l’Europe.

Enfin, est aussi en faillite l’idéologie du mondialisme, qui croit aux vertus d’une absolue division internationale du travail, n’obéissant qu’aux lois classiques du libéralisme économique. Il est inacceptable que nous dépendions aujourd’hui d’un pays aussi lointain et différent de nous que la Chine pour la fabrication de nos médicaments ; et que la Maison Blanche ait essayé de soudoyer le patron du laboratoire allemand CureVac, afin d’accaparer le vaccin qu’il est en train de mettre au point. Quand nous sortirons de cette pandémie, nous devrons établir d’urgence un réel souverainisme économique européen !

*Renaud Girard, membre du conseil d’orientation stratégique chez Geopragma

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