{"id":798,"date":"2019-06-03T16:37:25","date_gmt":"2019-06-03T14:37:25","guid":{"rendered":"http:\/\/geopragma.fr\/?p=798"},"modified":"2021-09-21T14:23:12","modified_gmt":"2021-09-21T12:23:12","slug":"p-lalonde-moscou-indispensable-faiseur-de-paix","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/geopragma.fr\/p-lalonde-moscou-indispensable-faiseur-de-paix\/","title":{"rendered":"P. Lalonde : \u00ab\u00a0Moscou, indispensable faiseur de paix\u00a0?\u00a0\u00bb"},"content":{"rendered":"
Le Billet du Lundi du 3 juin 2019, par Patricia Lalonde*<\/strong><\/p>\n Le monde est actuellement confront\u00e9 \u00e0 l\u2019une des plus graves crises depuis la Seconde Guerre Mondiale et le spectre d\u2019une prochaine guerre entre les Etats- Unis, Isra\u00ebl et certains pays arabes sunnites d\u2019un c\u00f4t\u00e9 et l\u2019Iran chiite et ses soutiens de l\u2019autre se rapproche. Elle a choisi de soutenir le renversement de r\u00e9gimes la\u00efcs au Moyen-Orient, prenant le risque d\u2019y installer des islamistes, pour ne pas nommer les Fr\u00e8res Musulmans. <\/span><\/p>\n Seule la Tunisie a r\u00e9sist\u00e9, un semblant de d\u00e9mocratie s\u2019y est install\u00e9<\/span> mais au prix d\u2019une grave crise \u00e9conomique que le chaos et la r\u00e9cente reprise de la guerre civile en Libye risquent d\u2019envenimer.<\/span><\/p>\n Alors que dans le Golf<\/span>e<\/span> des bruits de bottes se font entendre, que le destroyer Abraham Lincoln a franchi le Canal de Suez, que les \u00c9tats-Unis viennent d\u2019y envoyer 1 500 hommes de troupe<\/span> suppl\u00e9mentaires, que l\u2019Arabie Saoudite ne r\u00eave que d\u2019un sc\u00e9nario d\u2019invasion de l\u2019Iran et n\u2019h\u00e9site pas \u00e0 diffuser<\/span> une vid\u00e9o fiction montrant des chars saoudiens sur la place principale de T\u00e9h\u00e9ran et les Iraniens brandissant le fanion saoudien, il semble que le seul acteur capable de calmer le jeu et de parler et avec T\u00e9h\u00e9ran et avec les Saoudiens pour emp\u00eacher le pire soit la Russie.<\/span><\/p>\n Elle a en effet toujours entretenu des liens diplomatiques avec toutes les puissances engag\u00e9es dans ces guerres et s\u2019abrite derri\u00e8re le respect du droit international et de la souverainet\u00e9 des Etats et non derri\u00e8re l\u2019obsession d\u2019imposer la d\u00e9mocratie par la force.<\/span><\/p>\n Que ce<\/span> soit avec l\u2019Iran, l\u2019Arabie Saoudite, Isra\u00ebl, la Palestine, la Syrie, l\u2019Irak, l\u2019Egypte, le Y\u00e9men, la Libye, Moscou a toujours privil\u00e9gi\u00e9 la discussion, redorant ainsi le blason de la diplomatie,<\/span> et<\/span> su se mettre au centre de l\u2019\u00e9chiquier. La Russie a toujours refus\u00e9 de s\u2019enfermer dans un camp\u2026 bien qu\u2019elle fut longtemps accus\u00e9e d\u2019\u00eatre l\u2019alli\u00e9e des Iraniens en Syrie et en Irak. Ce ne fut pourtant pas le cas pour le <\/span>Y\u00e9men : quand le leader Abdelmalek al Houthi a demand\u00e9 en 2015 l\u2019aide de la Russie dans sa lutte contre la Coalition dirig\u00e9e par l\u2019Arabie Saoudite, celle-ci a refus\u00e9.<\/span><\/p>\n En Syrie, la Russie s\u2019est alli\u00e9e<\/span> avec les Iraniens dans le cadre de la lutte contre le terrorisme pour pr\u00e9server l\u2019int\u00e9grit\u00e9 de la Syrie\u2026 Elle n\u2019y est intervenue qu\u2019\u00e0 la demande du gouvernement syrien. Mais cela ne l\u2019a pas emp\u00each\u00e9e de conserver le lien avec Ankara, et m\u00eame, plus t\u00e9nu, avec les Kurdes.<\/span><\/p>\n Cette alliance de circonstance avec les Iraniens en Syrie n\u2019arr\u00eate d\u2019ailleurs pas Moscou pour continuer \u00e0 parler avec Isra\u00ebl et l\u2019Arabie Saoudite, se r\u00e9servant ainsi un r\u00f4le dans un r\u00e8glement de la crise isra\u00e9lo-palestinienne. Si Trump veut r\u00e9ussir son \u00ab deal<\/i> du si\u00e8cle \u00bb, il a besoin d\u2019obtenir des concessions des Iraniens, en Syrie et en Irak afin de rassurer Isra\u00ebl, concessions que seule la capitale moscovite pourrait obtenir.<\/span><\/p>\n C\u2019est pourquoi les derniers d\u00e9veloppements dans le Golfe mettent Moscou au centre du jeu. <\/span><\/p>\n Apr\u00e8s une \u00e9tape \u00e0 Bruxelles pour exiger des Europ\u00e9ens plus de fermet\u00e9 contre l\u2019Iran, Mike Pompeo a effectu\u00e9 un voyage pr\u00e9cipit\u00e9 \u00e0 Sochi pour rencontrer Vladimir Poutine et Serguei Lavrov. La nouvelle fourn\u00e9e de sanctions contre l\u2019Iran prise \u00e0 la suite de leur sortie de l\u2019accord nucl\u00e9aire, suivant celle des \u00c9tats-Unis<\/span> et la menace du destroyer am\u00e9ricain dans le canal de Suez ont tendu la situation. Le r\u00eave de Washington d\u2019un \u00ab regime change \u00bb en Iran s\u2019\u00e9loigne. Le peuple iranien se serre les coudes avec ses<\/span> dirigeants. <\/span><\/p>\n Les victoires obtenues par Ansarullah et son alli\u00e9 du GPC au Y\u00e9men fragilisent l\u2019alli\u00e9 saoudien et \u00e9mirati. <\/span>Le \u00ab sabotage \u00bb non revendiqu\u00e9 des p\u00e9troliers dans le port de Fujayrah aux \u00c9mirats Arabes Unis<\/span> ainsi que le drone lanc\u00e9 sur les installations p\u00e9troli\u00e8re d\u2019ARAMCO, revendiqu\u00e9 lui par les Houthis, ont encore fait monter<\/span> la tension<\/span> d\u2019un cran. Chaque d\u00e9rapage risque d\u2019\u00eatre un pr\u00e9texte tout trouv\u00e9 pour l\u2019Arabie Saoudite et les \u00c9mirats d\u2019obtenir des \u00c9tats-Unis une intervention militaire contre l\u2019Iran.<\/span><\/p>\n Le voyage<\/span> de Pompeo \u00e0 Sochi montre \u00e0 quel point les Am\u00e9ricains ont peur que la situation leur \u00e9chappe et d\u00e9montre, s\u2019il en \u00e9tait encore besoin, la position de force dans laquelle se trouve la Russie\u2026<\/span><\/p>\n Vladimir Poutine et son Ministre des Affaires \u00e9trang\u00e8res, Serguei Lavrov, se retrouvent donc en position de m\u00e9diateurs entre les Am\u00e9ricains et leurs alli\u00e9s sunnites, les Emirats et l\u2019Arabie Saoudite d\u2019un c\u00f4t\u00e9, l\u2019Iran chiite et ses relais de l\u2019autre. <\/span><\/p>\n Partout, Moscou est \u00e0 la manoeuvre.<\/span><\/p>\n <\/p>\n Comme l\u2019Iran refuse de n\u00e9gocier le fusil sur la tempe, Donald Trump est contraint d\u2019appeler Moscou \u00e0 l\u2019aide avant que la r\u00e9gion ne s\u2019enflamme, alors m\u00eame qu\u2019un haut-diplomate iranien<\/span> cherchant \u00e0 enfoncer un coin entre les Am\u00e9ricains et l\u2019Arabie Saoudite vient de d\u00e9clarer qu\u2019il pr\u00e9f\u00e9rait n\u00e9gocier avec les pays du Golfe plut\u00f4t qu\u2019avec les \u00c9tats-Unis. <\/span><\/p>\n Il est probable que les Am\u00e9ricains essaieront de n\u00e9gocier avec la Russie un d\u00e9sengagement des Iraniens de Syrie, voire d\u2019Irak. La contrepartie \u00e0 cette n\u00e9gociation pourrait \u00eatre d\u2019accepter de reconnaitre Bachar-el-Assad et l\u2019int\u00e9grit\u00e9 de la Syrie, ou l\u2019abandon de l\u2019intervention impopulaire des \u00c9tats-Unis dans la guerre du Y\u00e9men.<\/span><\/p>\n Mais il est peu probable que les Russes l\u00e2chent les Iraniens en Syrie au moment o\u00f9 la bataille d\u2019Idleb vient de s\u2019engager. <\/span><\/p>\n De m\u00eame, en Libye, les Russes vont avoir un r\u00f4le d\u00e9terminant : ils devront persuader Erdogan avec qui ils entretiennent de bonnes relations de l\u00e2cher des milices islamistes de Misrata, sans quoi aucun des deux camps ni celui<\/span> du Mar\u00e9chal Khalifa Haftar, ni celui du Fayez el-Sarraj, le pr\u00e9sident du Conseil du Gouvernement d\u2019Union nationale \u00e0 Tripoli, reconnu par la communaut\u00e9 internationale, ne pourront r\u00e9ussir \u00e0 stopper la guerre civile entre milices et \u00e0 r\u00e9unifier le pays. L\u00e0 encore la contrepartie pourrait se faire sur le terrain syrien et au d\u00e9triment des Kurdes.<\/span><\/p>\n Sans compter le derni\u00e8res rumeurs propag\u00e9es par le journal am\u00e9ricain \u00ab The Hill \u00bb qui sugg\u00e8re que Donald Trump pourrait \u00e9changer un l\u00e2chage de Nicolas Maduro au Venezuela par Poutine, contre un d\u00e9sengagement am\u00e9ricain en Ukraine !<\/span><\/p>\n Ce r\u00f4le central de la Russie, l\u2019Europe ne l\u2019a pas vu, toujours arcbout\u00e9e sur sa <\/span>th\u00e9orie du complot russe largement inspir\u00e9e par les Etats-Unis, et fortement relay\u00e9e dans l\u2019Union Europ\u00e9enne, notamment depuis 2004, et l\u2019entr\u00e9e dans l\u2019Union Europ\u00e9enne de pays de l\u2019Europe de l\u2019Est, encore traumatis\u00e9s par le souvenir du joug sovi\u00e9tique. Ce n\u2019est pas un hasard si le passe-temps favori du Parlement europ\u00e9en consiste \u00e0 faire voter des sanctions \u2026 particuli\u00e8rement contre les Russes, se drapant ainsi dans une bonne conscience aveugle qui bloque toute initiative diplomatique.<\/span><\/p>\n En prenant le leadership dans la r\u00e9solution des conflits au Proche et Moyen-Orient, <\/span>en refusant de soutenir les milices djihadistes en Syrie, au Y\u00e9men, en Libye, et en d\u00e9fendant partout le respect du droit international et la souverainet\u00e9 des \u00c9tats, la Russie occupe le r\u00f4le que l\u2019Europe aurait d\u00fb jouer. Mais l\u2019Europe a pr\u00e9f\u00e9r\u00e9 ob\u00e9ir \u00e0 l\u2019alli\u00e9 historique am\u00e9ricain. Elle a donc perdu cette place centrale. Angela Merkel elle-m\u00eame le reconna\u00eet : seule une Europe forte est capable de prendre en main son destin. <\/span><\/p>\n Que de temps perdu !<\/span><\/p>\n *Patricia Lalonde, Vice-pr\u00e9sidente de Geopragma <\/strong><\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":" Le Billet du Lundi du 3 juin 2019, par Patricia Lalonde* Le monde est actuellement confront\u00e9 \u00e0 l\u2019une des plus graves crises depuis la Seconde Guerre Mondiale et le spectre d\u2019une prochaine guerre entre les Etats- Unis, Isra\u00ebl et certains pays arabes sunnites d\u2019un c\u00f4t\u00e9 et l\u2019Iran chiite et ses soutiens de l\u2019autre se rapproche. 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\nEn s\u2019\u00e9tant align\u00e9e syst\u00e9matiquement derri\u00e8re les \u00c9tats-Unis dans tous les conflits de ces derni\u00e8res ann\u00e9es, pendant les Printemps Arabes (Tunisie, Egypte, Libye, Syrie et Y\u00e9men), l\u2019Europe semble d\u00e9j\u00e0 avoir choisi son camp\u2026<\/span><\/p>\n