{"id":382,"date":"2019-01-21T17:22:55","date_gmt":"2019-01-21T16:22:55","guid":{"rendered":"http:\/\/geopragma.fr\/?p=382"},"modified":"2021-09-21T15:41:30","modified_gmt":"2021-09-21T13:41:30","slug":"le-billet-du-lundi-quand-la-chine-pousse-les-etats-unis-a-sarmer-toujours-davantage-un-pied-de-nez-a-reagan-par-alexis-feertchak-21-01-2019","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/geopragma.fr\/le-billet-du-lundi-quand-la-chine-pousse-les-etats-unis-a-sarmer-toujours-davantage-un-pied-de-nez-a-reagan-par-alexis-feertchak-21-01-2019\/","title":{"rendered":"Alexis Feertchak : \u00ab\u00a0Quand la Chine pousse les Etats-Unis \u00e0 s\u2019armer toujours davantage\u00a0: un pied de nez \u00e0 Reagan\u00a0\u00bb"},"content":{"rendered":"
<\/span><\/p>\n BILLET DU LUNDI du 21\/01\/2019 par Alexis Feertchak*<\/strong><\/p>\n Faudra-t-il \u00e0 l\u2019avenir se m\u00e9fier des cargos am\u00e9ricains ? L\u2019United States Naval Institute, un think tank<\/em> proche de l\u2019US Navy, a propos\u00e9 dans un r\u00e9cent rapport de mettre en \u0153uvre au sein de la marine am\u00e9ricaine des cargos militaris\u00e9s emportant des missiles de croisi\u00e8re d\u00e9ploy\u00e9s dans ce que les anglo-saxons nomment des Vertical Launch System<\/em> (VLS), soit des silos de lancement verticaux. Une strat\u00e9gie \u00ablow cost<\/em>\u00bb qui pourrait permettre \u00e0 Washington de gonfler ses capacit\u00e9s de frappe et de r\u00e9pondre d\u2019une mani\u00e8re \u00e9conomiquement viable \u00e0 la course aux armements qui l\u2019oppose aux Chinois. Tout un symbole de la situation g\u00e9ostrat\u00e9gique dans laquelle nous nous trouvons : vu le niveau des d\u00e9penses militaires compar\u00e9es aux PIB (3,5% pour Washington, 2% pour P\u00e9kin), les Etats-Unis ne vont avoir d\u2019autre choix \u00e0 l\u2019avenir que se tourner vers des solutions moins co\u00fbteuses pour soutenir la pression. Dans cette affaire, la Chine d\u2019aujourd\u2019hui n\u2019est pas l\u2019URSS d\u2019hier !<\/span><\/p>\n L\u2019id\u00e9e de transformer un cargo civil en plate-forme lance-missiles n\u2019est pas sans rappeler le concept am\u00e9ricain d\u2019\u00abarsenal ship<\/em>\u00bb \u00e0 la fin des ann\u00e9es 1990, alors que les missiles de croisi\u00e8re Tomahawk avaient \u00e9t\u00e9 utilis\u00e9s avec succ\u00e8s lors de la Guerre du Golfe et des guerres en ex-Yougoslavie. Il s\u2019agissait d\u00e9j\u00e0 de concevoir une plateforme de fort tonnage permettant d\u2019empaqueter le plus grand nombre possible de missiles pour augmenter la capacit\u00e9 de frappe de la marine. <\/span><\/p>\n Rappelons que le trait\u00e9 INF sur les armes interm\u00e9diaires (aujourd\u2019hui remis en cause par Trump) liant Moscou et Washington, mais pas P\u00e9kin, emp\u00eache les Etats-Unis de frapper d\u2019\u00e9ventuels adversaires depuis la terre pour des port\u00e9es allant de 500 km \u00e0 5500 km (qu\u2019il s\u2019agisse ou non d\u2019une frappe nucl\u00e9aire). Mais cette limitation ne concerne pas les missiles tir\u00e9s depuis la mer. Les Etats-Unis ont donc palli\u00e9 celle-l\u00e0 gr\u00e2ce \u00e0 leur flotte : en quelques heures, la soixantaine de sous-nucl\u00e9aires d’attaque, les 22 croiseurs Ticonderoga <\/i>et les 66 destroyers Arleigh Burke<\/i> r\u00e9partis dans les six flottes de l\u2019US Navy sont capables de tirer plusieurs centaines de missiles de croisi\u00e8re Tomahawk sur une large partie du globe. Cette capacit\u00e9 de frappe conventionnelle \u00e0 haute pr\u00e9cision est l\u2019une des meilleures illustrations de la sur-puissance am\u00e9ricaine en mati\u00e8re militaire. Apr\u00e8s 1996, le projet d\u2019\u00abArsenal ship<\/em>\u00bb visant \u00e0 renforcer encore davantage la flotte de destroyers et de croiseurs est n\u00e9anmoins mis au placard, faute de financement, mais surtout parce que l\u2019US Navy ne connaissait pas \u00e0 l\u2019\u00e9poque de concurrents s\u00e9rieux. L\u2019Union sovi\u00e9tique n\u2019avait jamais r\u00e9ussi \u00e0 mettre en service un \u00e9quivalent du Tomahawk et la flotte russe durant les ann\u00e9es 1990 connut une d\u00e9r\u00e9liction rapide tandis que la Chine ne disposait alors que d\u2019une marine c\u00f4ti\u00e8re, pourvue de vieux navires sovi\u00e9tiques ou d\u2019\u00e9quipements indig\u00e8nes tr\u00e8s peu modernes.<\/span><\/p>\n Pourquoi le concept d\u2019\u00abarsenal ship<\/em>\u00bb revient-il \u00e0 l\u2019ordre du jour ? Le sujet peut para\u00eetre anecdotique, mais il ne l\u2019est pas tant que \u00e7a si l\u2019on songe \u00e0 ce qu\u2019il symbolise. Jusqu\u2019\u00e0 il y a quelques ann\u00e9es, les Etats-Unis disposaient d\u2019un quasi-monopole en mati\u00e8re de frappes mer-sol. Or, premi\u00e8rement, ce monopole n\u2019existe plus. Avec son missile Kalibr, la Russie dispose d\u2019un \u00e9quivalent du Tomahawk qui a fait ses preuves en Syrie \u00e0 de nombreuses reprises. Particularit\u00e9 russe : le Kalibr n\u2019est pas r\u00e9serv\u00e9 aux navires hauturiers, mais \u00e9quipe de petites corvettes de moins de 1000 tonnes, ce qui permet \u00e0 la Russie de poss\u00e9der une force de frappe de plusieurs centaines de missiles pour un co\u00fbt r\u00e9duit. Du c\u00f4t\u00e9 de P\u00e9kin, les destroyers les plus modernes de Type 052D (7500 t) et 055 (plus de 10.000 t) sortent en nombre des chantiers navals chinois. Equip\u00e9s de plusieurs dizaines de silos pouvant emporter des missiles de croisi\u00e8re, ces navires constituent l\u2019\u00e9pine dorsale de la flotte hauturi\u00e8re chinoise. Notons au passage que d\u2019autres pays se sont r\u00e9cemment \u00e9quip\u00e9s de missiles de croisi\u00e8re tir\u00e9s depuis la mer : le Vietnam (et peut-\u00eatre l\u2019Alg\u00e9rie) poss\u00e8dent le Kilo russe, la France (avec le MdCn emport\u00e9e sur les FREMM), la Cor\u00e9e du Sud ou Isra\u00ebl disposent de leur propre missile tandis que le Royaume-Uni utilise le Tomahawk am\u00e9ricain. <\/span><\/p>\n Deuxi\u00e8mement, les diverses strat\u00e9gies de d\u00e9ni d\u2019acc\u00e8s, de mieux en mieux ma\u00eetris\u00e9es par la Chine ou la Russie, affaiblissent de facto<\/i> les capacit\u00e9s de frappe am\u00e9ricaines. Moscou et P\u00e9kin disposent de syst\u00e8mes d\u2019armement qui, combin\u00e9s entre eux, r\u00e9duisent l\u2019efficacit\u00e9 de celles-ci, voire m\u00eame la possibilit\u00e9 m\u00eame de les effectuer dans certains cas. Citons :<\/span><\/p>\n Il ne faut pas exag\u00e9rer l\u2019invuln\u00e9rabilit\u00e9 de ces bulles A2AD (Air Access Air Denial<\/em>), qui donnent lieu \u00e0 bien des fantasmes sur l\u2019affaiblissement suppos\u00e9 des Etats-Unis, mais force est de constater que des contraintes grandissantes p\u00e8sent bel et bien sur la puissance militaire am\u00e9ricaine. Nous en avons nous-m\u00eames fait les frais en 2016 lors des frappes occidentales contre la Syrie. Plusieurs semaines apr\u00e8s, certains m\u00e9dias se sont fait l\u2019\u00e9cho de l\u2019\u00e9chec du lancement des MdCN depuis nos FREMM stationn\u00e9es en M\u00e9diterran\u00e9e orientale. En cause : le d\u00e9ploiement de la fr\u00e9gate russe Amiral Grigorovitch<\/i> qui aurait actionn\u00e9 un syst\u00e8me de brouillage \u00e9lectronique visiblement efficace. <\/span><\/p>\n Le concept d\u2019un porte-conteneurs militaris\u00e9 transform\u00e9 en lance-missiles prend son sens dans ce contexte d\u2019un affaiblissement relatif de la marine am\u00e9ricaine. Si la marine russe restera une puissance principalement littorale (hormis en mati\u00e8re de sous-marins nucl\u00e9aires o\u00f9 ses pr\u00e9tentions sont sup\u00e9rieures), la marine chinoise devrait occuper toujours plus les oc\u00e9ans : elle pourra compter d\u2019ici 2020 sur une soixantaine de destroyers modernes et sur autant de fr\u00e9gates. D\u2019ici 2025, 4 porte-avions (2 STOBAR et 2 CATOBAR, dont un \u00e0 propulsion nucl\u00e9aire comme les Am\u00e9ricains et le Fran\u00e7ais) viendront augmenter consid\u00e9rablement ses capacit\u00e9s a\u00e9ronavales. <\/span><\/p>\n Conscient de ce risque, Donald Trump a annonc\u00e9 sa volont\u00e9 de voir le format de l\u2019US Navy passer \u00e0 355 navires, contre 270 aujourd\u2019hui. Mais l\u2019administration autant que les Think Tank am\u00e9ricains sont unanimes : les Etats-Unis ne disposent pas des capacit\u00e9s financi\u00e8res et industrielles pour r\u00e9aliser un tel bond avant trente ans. \u00abLe co\u00fbt de la construction et de l\u2019exploitation de la flotte propos\u00e9e s\u2019\u00e9l\u00e8verait en moyenne \u00e0 109 milliards de dollars par an (2018 dollars) jusqu\u2019en 2047, au moins un tiers de plus que le montant affect\u00e9 \u00e0 l\u2019exercice 2016 pour la flotte actuelle de 275 navires\u00bb, explique le think tank<\/em>, citant le Congressional Budget Office<\/em> (CBO). Difficile en effet d\u2019augmenter le format de la flotte alors que les programmes les plus r\u00e9cents \u2013 porte-avions nucl\u00e9aires Gerald Ford<\/i>, destroyers Zumwalt<\/i>, littoral combat ships Freedom<\/i> et Independence<\/i> \u2013 accusent tous des retards, des surco\u00fbts et des probl\u00e8mes techniques consid\u00e9rables. En d\u2019autres termes, la croissance de la marine am\u00e9ricaine, si elle repose sur le renforcement des programmes actuels et la poursuite de programmes plus anciens (notamment le destroyer Arleigh Burke<\/em> qui devrait fr\u00f4ler les 100 exemplaires construits), n\u2019est pas soutenable, m\u00eame pour la premi\u00e8re \u00e9conomie du monde. <\/span><\/p>\nLes Etats-Unis n\u2019ont plus le monopole du Tomahawk<\/b><\/span><\/h2>\n
\n
L\u2019US Navy face \u00e0 une croissance impossible<\/b><\/span><\/h2>\n
Une solution \u00abdiscount\u00bb<\/b><\/span><\/h2>\n