{"id":18356,"date":"2023-01-08T19:31:33","date_gmt":"2023-01-08T18:31:33","guid":{"rendered":"https:\/\/geopragma.fr\/?p=18356"},"modified":"2023-01-08T19:33:55","modified_gmt":"2023-01-08T18:33:55","slug":"quel-avenir-aux-empires","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/geopragma.fr\/quel-avenir-aux-empires\/","title":{"rendered":"Quel avenir aux empires\u00a0?"},"content":{"rendered":"\n
Billet du lundi 09 janvier 2023 r\u00e9dig\u00e9 par Pierre de Lauzun, membre fondateur et membre du Conseil d\u2019administration de Geopragma.<\/p>\n\n\n\n
Nous sommes tellement convaincus que la d\u00e9mocratie \u00e0 l\u2019occidentale est l\u2019\u00e9tape finale de l\u2019histoire que nous n\u2019envisageons pas un instant que celle-ci puisse aller dans un autre sens. Cela r\u00e9sulte du fait que la d\u00e9mocratie \u00e9tant sacralis\u00e9e dans nos soci\u00e9t\u00e9s comme le bien par excellence, on ne voit d\u2019alternative que dans ce qui parait \u00eatre le mal absolu, et qu\u2019on croit \u00eatre l\u2019oppos\u00e9 exact de la d\u00e9mocratie, le totalitarisme. Mais il y a d\u2019autres configurations possibles, comme l\u2019histoire l\u2019a montr\u00e9. Et notamment les empires. L\u2019actualit\u00e9 met en outre les projecteurs sur la coupure en cours entre les d\u00e9mocraties occidentales et ce qu\u2019on per\u00e7oit comme une alternative russo-chinoise, vue comme autoritaire, agressive et, pr\u00e9cis\u00e9ment, imp\u00e9riale.<\/p>\n\n\n\n
On parle donc beaucoup d\u2019empires. Mais avec beaucoup d\u2019impr\u00e9cision. Il y en a eu des formes vari\u00e9es dans l\u2019histoire, mais le terme n\u2019a son sens plein que pour d\u00e9signer un pouvoir autoritaire, direct, sur un territoire vaste et relativement h\u00e9t\u00e9rog\u00e8ne, d\u00e9passant l\u2019horizon d\u2019une nation. C\u2019est le sens qui sera retenu ici. Au sens strict il n\u2019y a en plus vraiment aujourd\u2019hui, tout au plus partiellement : le langage courant parle d\u2019empire am\u00e9ricain, pour ce qu\u2019il est plus pr\u00e9cis d\u2019appeler une h\u00e9g\u00e9monie<\/em>.<\/p>\n\n\n\n Est-ce \u00e0 dire qu\u2019il n\u2019y en aura plus \u00e0 l\u2019avenir ? Non, et le contraire est m\u00eame probable. Nous sommes en effet dans une p\u00e9riode de transition : nos syst\u00e8mes donnent bien des signes de faiblesse, les brassages de peuples s\u2019intensifient notamment dans les pays avanc\u00e9s, de nouvelles puissances montent, et la guerre r\u00e9appara\u00eet l\u00e0 o\u00f9 on ne l\u2019attendait plus. L\u2019histoire va donc se remettre en mouvement. Or dans une p\u00e9riode troubl\u00e9e et \u00e9volutive, la formule imp\u00e9riale a toutes ses chances. Ce qui ne veut pas dire que cela soit souhaitable\u2026<\/p>\n\n\n\n Le terme d\u2019empire d\u00e9fini comme ci-dessus s\u2019oppose \u00e0 celui de nation. Ce qui caract\u00e9rise sauf rares exceptions une nation est son homog\u00e9n\u00e9it\u00e9 ethnoculturelle. L\u2019empire, lui, est plurinational, m\u00eame si une ethnie ou nation y domine. La probl\u00e9matique de l\u2019empire se d\u00e9finit d\u00e8s lors largement par rapport \u00e0 la question nationale. Un des aspects de cette opposition est la question de la d\u00e9mocratie. Comme je l\u2019ai montr\u00e9 ailleurs (Les Nations et leur destin<\/em>), le syst\u00e8me d\u00e9mocratique exige normalement de s\u2019appliquer \u00e0 une nation, homog\u00e8ne, ayant la m\u00eame langue et la m\u00eame culture. Une nation peut \u00eatre d\u00e9mocratique (au sens large) ou pas, un empire normalement pas.<\/p>\n\n\n\n Un empire est en g\u00e9n\u00e9ral le fruit d\u2019une conqu\u00eate militaire, et le rapport de forces en reste une dimension essentielle. Certains sont plus ou moins \u00e9ph\u00e9m\u00e8res, et sans trace historique ult\u00e9rieure. Car ils durent en g\u00e9n\u00e9ral moins que les nations au sens large, parce que plus complexes, et faute du support objectif que ces derni\u00e8res trouvent dans le fait national. Mais on a des cas d\u2019empires qui ont dur\u00e9 longtemps et jou\u00e9 un r\u00f4le significatif, ainsi Rome, ou la Chine imp\u00e9riale. Toutes deux se sont av\u00e9r\u00e9es capables d\u2019offrir une possibilit\u00e9 r\u00e9elle d\u2019assimilation aux populations conquises et d\u2019abord \u00e0 leurs dirigeants. Par-l\u00e0 de tels empires ont adopt\u00e9 certains des traits d\u2019une nation, et notamment une certaine unit\u00e9 linguistique. Et ils ont dur\u00e9 plus longtemps.<\/p>\n\n\n\n L\u2019exp\u00e9rience de l\u2019Europe est tout \u00e0 fait diff\u00e9rente. L\u2019histoire europ\u00e9enne n\u2019a pas fourni de cas d\u2019unification imp\u00e9riale et s\u2019est m\u00eame caract\u00e9ris\u00e9e par son \u00e9loignement de ce mod\u00e8le, qui impr\u00e9gnait pourtant les esprits encore au Moyen \u00c2ge. Cette grande fragmentation politique sur une base largement nationale est sp\u00e9cifique \u00e0 l\u2019Europe. Quant aux empires coloniaux europ\u00e9ens \u00e0 partir du XIXe<\/sup>, ils \u00e9taient clairement distingu\u00e9s de leurs m\u00e9tropoles. Celles-ci \u00e9taient des d\u00e9mocraties au moins partielles, nationales, et leurs empires non. Ils ont jou\u00e9 un r\u00f4le d\u00e9cisif pour modeler la plan\u00e8te telle que nous la connaissons. Mais fond\u00e9s qu\u2019ils \u00e9taient sur des principes contradictoires et sur un rapport de force transitoire, sans v\u00e9ritable assimilation, ils ont tr\u00e8s peu dur\u00e9.<\/p>\n\n\n\n On l\u2019a dit, l\u2019empire est une entit\u00e9 vaste, complexe, r\u00e9unissant des parties h\u00e9t\u00e9rog\u00e8nes. L\u2019\u00c9tat-nation, lui, raisonne sur un seul peuple, un seul territoire, une seule communaut\u00e9 politique. La nation tend \u00e0 homog\u00e9n\u00e9iser et exclure ce qui n\u2019entre pas dans son sch\u00e9ma, l\u2019empire lui traite diff\u00e9remment les diff\u00e9rents peuples. Il accepte la diff\u00e9rence comme telle, moyennant soumission\u00a0; l\u2019\u00c9tat-nation cherche \u00e0 la d\u00e9passer. Cette h\u00e9t\u00e9rog\u00e9n\u00e9it\u00e9 possible permet \u00e0 un empire de gouverner, du moins un temps, des ensembles plus vastes et diversifi\u00e9s, ce que la base nationale exclut. Les empires sont d\u2019ailleurs souvent pragmatiques et flexibles, tant que leur pouvoir n\u2019est pas remis en cause.<\/p>\n\n\n\n L\u2019existence de sous-communaut\u00e9s est relativement compatible avec les syst\u00e8mes autoritaires et donc les empires. Mais c\u2019est contradictoire avec une d\u00e9mocratie. Celle-ci suppose en effet que les \u00e9lections se fassent sur la base d\u2019un vote sur des options diverses, au sein d\u2019une population suffisamment coh\u00e9rente et homog\u00e8ne pour que la minorit\u00e9 accepte la loi de la majorit\u00e9 comme repr\u00e9sentative d\u2019un peuple auquel tous s\u2019identifient. Si ce n\u2019est pas le cas, la d\u00e9mocratie sera remise en cause et, au-del\u00e0 d\u2019elle, la vie commune et la solidarit\u00e9 qu\u2019elle comporte.<\/p>\n\n\n\n D\u2019o\u00f9 une cons\u00e9quence importante : l\u2019empire (ou un autre syst\u00e8me autoritaire) peut donner une r\u00e9ponse \u00e0 la d\u00e9sagr\u00e9gation de syst\u00e8mes politiques, notamment d\u00e9mocratiques, si leur h\u00e9t\u00e9rog\u00e9n\u00e9it\u00e9 notamment culturelle ou ethnique devient ing\u00e9rable. Ce qui nous conduit \u00e0 une interrogation importante pour notre \u00e9poque. Au vu de l\u2019h\u00e9t\u00e9rog\u00e9n\u00e9it\u00e9 et des fragilit\u00e9s croissantes de nos constructions politiques, l\u2019id\u00e9e vient \u00e0 l\u2019esprit que les chances des empires \u00e0 l\u2019avenir sont loin d\u2019\u00eatre nulles, malgr\u00e9 leur limites.<\/p>\n\n\n\n O\u00f9 en est-on aujourd\u2019hui ? Si nous n\u2019avons actuellement plus d\u2019empire au sens retenu ici, certaines situations m\u00e9ritent attention.<\/p>\n\n\n\n Il y a d\u2019abord actuellement plusieurs exemples interm\u00e9diaires, de pays pluriethniques ou plurinationaux, mais o\u00f9 l\u2019une de ces nations ou ethnies est nettement majoritaire et structure l\u2019\u00c9tat. Des exemples \u00e9vidents en sont l\u2019Iran, la Turquie, certains pays d\u2019Am\u00e9rique latine Ces minorit\u00e9s fortes subsistent, mais elles sont en position d\u2019inf\u00e9riorit\u00e9 nette\u00a0; et donc cela peut durer.<\/p>\n\n\n\n Le cas russe est \u00e0 mettre \u00e0 part. Il y a toujours eu dans l\u2019empire russe comme en URSS une majorit\u00e9 russe, mais les minorit\u00e9s y \u00e9taient importantes. A l\u2019\u00e9poque, le pouvoir avait su se maintenir par un m\u00e9lange d\u2019autoritarisme et d\u2019int\u00e9gration habile d\u2019\u00e9lites locales, qui trouvaient une place dans le syst\u00e8me imp\u00e9rial. Cet empire s\u2019est d\u00e9sagr\u00e9g\u00e9. Reste aujourd\u2019hui une situation confuse. Il y a en Russie m\u00eame des minorit\u00e9s appr\u00e9ciables, notamment musulmanes. En cela, elle se rangerait plut\u00f4t dans la s\u00e9rie pr\u00e9c\u00e9dente. Mais le cas russe en diff\u00e8re \u00e0 deux titres, le premier \u00e9tant la pr\u00e9sence de minorit\u00e9s russes \u00e0 l\u2019ext\u00e9rieur, question sensible et reli\u00e9e au pass\u00e9 imp\u00e9rial. Le deuxi\u00e8me est que la Russie ne consid\u00e8re pas ce qui relevait de l\u2019empire russe ou de l\u2019URSS comme compl\u00e8tement ext\u00e9rieur. D\u2019une certaine fa\u00e7on, sa conception de soi et ses fronti\u00e8res ne sont pas clarifi\u00e9es. D\u2019o\u00f9 la question d\u2019une permanence imp\u00e9riale dans la probl\u00e9matique russe.<\/p>\n\n\n\n La Chine pr\u00e9sente des traits analogues, avec ses minorit\u00e9s tib\u00e9taines, ou\u00efgoures etc., mais en moins marqu\u00e9\u00a0: la pr\u00e9pond\u00e9rance de l\u2019ethnie chinoise y est massive\u00a0; en outre son territoire correspond tr\u00e8s largement \u00e0 celui de l\u2019ancien empire\u00a0et elle a peu de revendications historiques \u00e0 faire valoir.<\/p>\n\n\n\n Un empire \u00e0 l\u2019ancienne suppose la conqu\u00eate militaire par un pays de ses voisins. A premi\u00e8re vue, il para\u00eet ne pas y avoir de base pour cela dans le monde que nous connaissons aujourd\u2019hui. En outre le maintien de l\u2019h\u00e9g\u00e9monie am\u00e9ricaine dans des zones majeures de la plan\u00e8te rend l\u2019exercice difficile.<\/p>\n\n\n\n Il y a une exception possible, on l\u2019a vu\u00a0: la Russie. Mais en regardant de pr\u00e8s, la r\u00e9ponse ne para\u00eet pas non plus assur\u00e9e. On note d\u2019abord dans ce pays une h\u00e9sitation entre le mod\u00e8le imp\u00e9rial et un mod\u00e8le national russe\u00a0: l\u2019invasion de l\u2019Ukraine est-elle motiv\u00e9e par la remise en cause de sa r\u00e9alit\u00e9 comme \u00c9tat, au profit d\u2019une vision imp\u00e9riale\u00a0; ou n\u2019assiste-t-on pas, de fa\u00e7on pas n\u00e9cessairement consciente c\u00f4t\u00e9 russe, \u00e0 une affirmation ethnico-nationale proprement russe\u00a0? En tout cas l\u2019agression a eu pour effet de souder un sentiment national ukrainien jusqu\u2019ici flou, appel\u00e9 \u00e0 durer au moins dans la partie centre et ouest. De ce point de vue, l\u2019invasion aura probablement ce r\u00e9sultat a priori<\/em> paradoxal d\u2019y faire basculer la probl\u00e9matique dans un sens national homog\u00e8ne, comme l\u2019ont fait les nettoyages ethniques post-yougoslaves. S\u2019agissant des autres minorit\u00e9s russes ou russophones de la p\u00e9riph\u00e9rie imm\u00e9diate, on pourrait imaginer une agression russe dans les pays baltes (mais la Russie se heurterait ici directement \u00e0 l\u2019Otan), ou au Kazakhstan. Mais l\u00e0 encore cela ne d\u00e9boucherait pas sur un empire, et par certains c\u00f4t\u00e9s au contraire\u00a0: on s\u2019\u00e9loignerait de ce mod\u00e8le pour se rapprocher d\u2019une logique purement nationale (agressive en l\u2019occurrence). Tout autre est la question des \u00e9ventuelles ambitions russes au-del\u00e0 de ce p\u00e9rim\u00e8tre russophone, notamment dans sa zone de domination anciennement sovi\u00e9tique (Caucase, Asie centrale, etc.). Mais en supposant que la Russie en ait l\u2019intention, elle ne para\u00eet en \u00e9tat d\u2019aller bien loin, au vu des limites de l\u2019arm\u00e9e russe apparues en Ukraine, sans parler de celles de l’\u00e9conomie et de la d\u00e9mographie ; et elle se heurterait assez vite \u00e0 d\u2019autres puissances (Otan, et m\u00eame Chine). Et ce serait a fortiori<\/em> le cas au-del\u00e0 de ces zones. D\u00e8s lors, la perspective v\u00e9ritablement imp\u00e9riale appara\u00eet dans les ann\u00e9es qui viennent plut\u00f4t limit\u00e9e pour ce pays, au-del\u00e0 d\u2019une forme d\u2019h\u00e9g\u00e9monie sur une partie de l\u2019ancienne URSS.<\/p>\n\n\n\n La perspective imp\u00e9riale est en revanche bien plus plausible \u00e0 terme plus ou moins \u00e9loign\u00e9 dans le monde arabo-musulman, surtout avec le recul de l\u2019h\u00e9g\u00e9monie am\u00e9ricaine. Ainsi dans le monde arabe o\u00f9 les \u00c9tats restent assez artificiels, et souvent sans base nationale propre suffisante. Par ailleurs, Turquie et Iran, en partie h\u00e9t\u00e9rog\u00e8nes, ont \u00e9t\u00e9 de vrais empires et s\u2019en souviennent. La Turquie notamment, avec sa nostalgie ottomane soigneusement entretenue par R. Erdogan et la constitution progressive d\u2019un r\u00f4le international qui pourrait assez vite tourner \u00e0 l\u2019empire. Mais un Iran d\u00e9passant l\u2019impasse actuelle pourrait aussi entrer dans ce sch\u00e9ma.<\/p>\n\n\n\n De m\u00eame, la possibilit\u00e9 d\u2019empires est tout \u00e0 fait concevable \u00e0 terme en Asie, notamment avec l\u2019impressionnante \u00e9mergence de puissances comme la Chine ou l\u2019Inde. Certes, cela ne para\u00eet pas \u00eatre leur priorit\u00e9 dans l\u2019imm\u00e9diat, car elles sont pour l\u2019essentiel ax\u00e9es sur leur mont\u00e9e en puissance, m\u00eame si elles ne d\u00e9daignent pas d\u2019exercer une forme d\u2019h\u00e9g\u00e9monie. Mais la situation pourrait \u00e9voluer \u00e0 terme plus long. Et leur surpuissance par rapport aux pays voisins sera alors consid\u00e9rable.<\/p>\n\n\n\n Il est int\u00e9ressant d\u2019\u00e9largir le d\u00e9bat au-del\u00e0 des empires classiques, construits sur une base guerri\u00e8re. A notre \u00e9poque on peut en effet envisager des processus diff\u00e9rents d\u2019\u00e9volution vers des formes politiques de type imp\u00e9rial. A terme plus ou moins long, dans un contexte instable o\u00f9 la confiance deviendrait tr\u00e8s difficile, des formules robustes comme celle-l\u00e0 peuvent alors avoir leurs chances. La remarque vaut bien s\u00fbr d\u2019abord pour les empires \u00e9ventuels qu\u2019on vient d\u2019\u00e9voquer, des h\u00e9g\u00e9monies pouvant devenir tellement pr\u00e9gnantes qu\u2019elles ressemblent \u00e0 des empires ; on pense alors naturellement d\u2019abord \u00e0 la Chine.<\/p>\n\n\n\n Mais la question m\u00e9rite d\u2019\u00eatre pos\u00e9e dans le cas de l\u2019Europe. En fait, \u00e9l\u00e9ment militaire mis \u00e0 part, l\u2019Union europ\u00e9enne ressemble quelque peu \u00e0 un empire : ce n\u2019est pas une nation mais elle est compos\u00e9e de nations vari\u00e9es ; elle constitue un pouvoir supranational en surplomb, qui se fonde certes en principe sur les d\u00e9mocraties nationales, mais tend \u00e0 consid\u00e9rer le niveau national comme subalterne, historiquement d\u00e9pass\u00e9, \u00e0 r\u00e9guler par en-haut. Ce pouvoir n\u2019est pas \u00e9lu directement comme un pouvoir politique national ; le \u2018parlement\u2019 est \u00e9lu sur la base d\u2019\u00e9lections qui se font en fait sur des listes nationales ; l\u2019ex\u00e9cutif n\u2019est pas \u00e9lu. Le pouvoir politique europ\u00e9en n\u2019est donc pas v\u00e9ritablement responsable devant des \u00e9lecteurs. Ce pouvoir reste toutefois limit\u00e9 \u00e0 certains domaines, m\u00eame s\u2019ils sont de plus en plus vastes ; on reste donc dans une situation interm\u00e9diaire. <\/a><\/p>\n\n\n\n Comment peut-il \u00e9voluer ? Il ne peut pas se construire politiquement comme une d\u00e9mocratie nationale : il n\u2019y a pas de peuple europ\u00e9en, ni de vie politique europ\u00e9enne. Il pourrait \u00e9videmment se reb\u00e2tir sur un projet diff\u00e9rent, fond\u00e9 sur ses nations, mais il ne prend pas ce chemin. Il peut bien s\u00fbr continuer de stagner dans un entre-deux b\u00e2tard sous h\u00e9g\u00e9monie am\u00e9ricaine : c\u2019est le plus probable.<\/p>\n\n\n\n Mais, hors une dislocation possible, on peut imaginer un autre sc\u00e9nario, surtout en cas de crise grave. Dans un contexte de fragilisation des syst\u00e8mes politiques et \u00e9conomiques nationaux, dont les bases d\u2019identification nationale ont \u00e9t\u00e9 \u00e9rod\u00e9es, ce \u00e0 quoi s\u2019ajoute l\u2019h\u00e9t\u00e9rog\u00e9n\u00e9it\u00e9 croissante des populations vivant en Europe, avec une immigration massive qui peut encore s\u2019acc\u00e9l\u00e9rer, on peut imaginer, lors d\u2019une crise tr\u00e8s grave, un transfert de pouvoir massif, plus ou moins consensuel des \u00e9tats membres \u00e0 Bruxelles, qui deviendrait t\u00eate d\u2019une sorte d\u2019empire. Cela dit, cet empire resterait un peu bizarre, du fait que militairement il est a priori<\/em> peu probable \u00e0 ce stade qu\u2019il se d\u00e9tache de l\u2019Otan et donc de l\u2019h\u00e9g\u00e9monie am\u00e9ricaine. C\u2019est donc un sc\u00e9nario, mais pas la plus forte probabilit\u00e9.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":" Billet du lundi 09 janvier 2023 r\u00e9dig\u00e9 par Pierre de Lauzun, membre fondateur et membre du Conseil d\u2019administration de Geopragma. Nous sommes tellement convaincus que la d\u00e9mocratie \u00e0 l\u2019occidentale est l\u2019\u00e9tape finale de l\u2019histoire que nous n\u2019envisageons pas un instant que celle-ci puisse aller dans un autre sens. 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Empires et nations\u00a0: forces et faiblesses<\/em><\/h3>\n\n\n\n
Des exemples d\u2019empires d\u00e8s aujourd\u2019hui\u00a0?<\/em><\/h3>\n\n\n\n
A terme, la r\u00e9\u00e9mergence d’empires\u00a0?<\/em><\/h3>\n\n\n\n
Une forme nouvelle d\u2019empire\u00a0: l\u2019Europe\u00a0?<\/em><\/h3>\n\n\n\n